Des organismes pour hommes agressés sexuellement se disent débordés

Des organismes pour hommes agressés sexuellement se disent débordés
Des organismes pour hommes agressés sexuellement se disent débordés

Les hommes qui ont subi une agression sexuelle sont de plus en plus nombreux à demander de l’aide au Québec. Chez les trois organismes qui se spécialisent uniquement dans le soutien à cette clientèle, le nombre de demandes a bondi de 70 % de 2019-2020 à 2023-2024, a appris Le Devoir.

La parole des victimes s’est davantage libérée grâce aux vagues de dénonciations médiatiques, selon les responsables de ces centres, si bien que plus d’hommes osent briser le silence et appeler à l’aide. Mais les organismes se retrouvent débordés et certains s’inquiètent que les délais pour avoir accès à leurs services s’allongent.

À l’heure actuelle, les hommes qui contactent le CRIPHASE (Centre de ressources et d’intervention pour hommes abusés sexuellement dans leur enfance), à Montréal, doivent patienter en moyenne six mois avant de recevoir des services, se désole la directrice générale, Martine Poirier. « Quand tu dis à une victime qui a commencé à parler de tout remballer et d’attendre six mois, il se peut qu’elle remballe tout ça bien serré. La personne va peut-être sauter son tour et revenir seulement dans deux, trois ans. »

Situés sur Le Plateau-Mont-Royal, les locaux de l’organisme ressemblent à un appartement feutré, avec ses pièces intimes, ses fauteuils et ses murs bleus garnis de tableaux. Ici, des Montréalais viennent rompre le silence lors de suivis individuels ou de groupe qui se font avec des intervenants psychosociaux.

Au Québec, les hommes peuvent cogner à différentes portes pour obtenir du soutien : les centres d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) et les centres d’aide aux victimes de violences sexuelles (qui aident des personnes de tous genres et de tous sexes), ou encore des organismes pour hommes en difficulté. Mais seulement trois organismes se consacrent spécifiquement aux victimes masculines d’agressions sexuelles : le CRIPHASE, le SHASE (Soutien aux hommes agressés sexuellement Estrie), à Sherbrooke, et l’EMPHASE (Entraide Mauricie–Centre-du-Québec pour hommes agressés sexuellement dans l’enfance), qui compte une maison mère située à Trois-Rivières et quatre bureaux satellites sur le territoire.

Ces trois centres ont reçu, en tout, 474 demandes d’aide en 2023-2024, par rapport à 279 en 2019-2020. L’augmentation a été particulièrement marquée à EMPHASE, qui a vu son nombre de demandes d’aide quadrupler au cours de cette même période, passant de 42 à 168.

Ces chiffres ne peuvent pas s’expliquer par une recrudescence de la violence, selon Samuel Dussault, directeur du Regroupement des organismes québécois pour les hommes agressés sexuellement (ROQHAS). C’est plutôt le signe que les victimes sont plus disposées qu’auparavant à s’ouvrir sur ce qu’elles ont vécu, dans la foulée du mouvement #MoiAussi, lancé en 2017, et d’autres prises de parole publiques à ce sujet.

Les données du ministère de la Sécurité publique, relayées par l’Institut de la statistique du Québec, confirment cette tendance : de 2016 à 2022, le nombre de victimes d’infractions sexuelles déclarées par la police a grimpé de 97 % chez les femmes, et de 68 % chez les hommes.

« Le tabou dans le tabou »

Les agressions sexuelles demeurent néanmoins l’un des crimes les plus souvent gardés sous silence.

Et bien qu’ils soient moins nombreux à subir ce type de violences, les hommes seraient encore plus hésitants à les dénoncer, en raison de l’éducation qu’ils ont reçue, observe Marie-Christine Villeneuve, coordonnatrice aux communications et aux relations publiques du réseau des CAVAC. « Des préjugés sont toujours véhiculés dans la société voulant par exemple que les hommes doivent être capables de se défendre ou qu’ils ne refusent jamais un rapport sexuel parce qu’ils ont beaucoup de désir. »

Les agressions sexuelles chez les hommes sont « le tabou dans le tabou », résume Martine Poirier.

Les nouvelles générations ont peut-être moins tendance à taire ce genre de traumatisme, observe toutefois le directeur du SHASE, Alexandre Tremblay-Roy. La moyenne d’âge des personnes qui fréquentent son organisme a diminué ces dernières années, passant de 55 à 40 ans. « On a de plus en plus de jeunes adultes qui sont à l’université et qui viennent chercher de l’aide. »

Il demeure que les hommes attendent généralement entre 20 et 30 ans, dit-il, avant d’avoir recours à des services pour des violences sexuelles qu’ils ont subies.

C’est le cas d’André, un policier retraité de 68 ans, qui a mis trois décennies avant de contacter un organisme au sujet de l’agression qu’il a vécue à l’âge de 13 ans. « Je n’en avais parlé à personne, de peur de ne pas être cru. »

Blagueur et charismatique, il se met à parler plus lentement lorsqu’il aborde ses années de pensionnaire dans un collège tenu par des religieux. Une nuit, il s’est réveillé et a surpris l’un des frères, qui agissait comme son tuteur au pensionnat, en train de retirer sa main de sur ses parties génitales, sous son pyjama. Au petit matin, deux boutons de son pantalon habituellement très résistants étaient détachés. « Ça a confirmé qu’il s’était passé quelque chose. »

Longtemps, André a engourdi son mal-être avec la bière. Il souligne toutefois fièrement ne plus boire depuis 26 ans, « grâce aux Alcooliques anonymes ». Il y a deux ans, il a décidé de poursuivre son cheminement en demandant de l’aide au CRIPHASE. L’ex-policier y pratique désormais l’art-thérapie, dont il raffole. « C’est libérateur de comprendre tout le tort que l’agression sexuelle m’a fait. Ça ne se gère pas seul, ce type de colère. C’est impossible. C’est trop lourd. »

À présent, cet amoureux de la nature prend soin de lui. « Ma qualité de vie est importante pour moi. Je n’ai pas de temps à perdre, car je suis rendu dans mon dernier tiers de vie », confie celui qui s’élancera sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle en septembre prochain.

Manque de financement décrié

Au CRIPHASE, Martine Poirier se désole de n’avoir qu’une dizaine d’intervenants pour accompagner tous les Montréalais qui, comme André, en ont besoin. « Le nombre d’intervenants va aller avec mon financement. Si je n’ai pas [plus] de financement, je ne peux pas en engager. On a la volonté de desservir plus de gens », soutient-elle, en soupirant.

« Notre enveloppe budgétaire n’est vraiment pas énorme », renchérit la directrice d’EMPHASE, Karine Vallières. Elle espère d’ailleurs avoir les moyens de maintenir ouverts les nouveaux points de services qu’elle a mis en place récemment à Victoriaville, Drummondville, Shawinigan et La Tuque.

En plus d’augmenter le financement des organismes, Québec devrait lancer des campagnes de sensibilisation qui ciblent directement et uniquement les hommes victimes de violences sexuelles, estime Samuel Dussault, directeur du ROQHAS. « Cela permettrait à de nombreux hommes de reconnaître leur vécu comme étant une agression sexuelle. »

Contacté par Le Devoir, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) affirme, dans une réponse écrite, être « très sensible à la situation des hommes victimes de violence sexuelle et avoir à coeur de leur offrir le soutien adéquat, notamment par son engagement dans l’élaboration et la mise en oeuvre de la Stratégie gouvernementale intégrée pour contrer la violence sexuelle, la violence conjugale et Rebâtir la confiance 2022-2027 ».

« En 2023-2024, le MSSS a versé plus de 28 millions de dollars pour l’ensemble des organismes oeuvrant en violence sexuelle, dont plusieurs oeuvrant auprès des hommes victimes », précise le ministère. Il ajoute que pour l’année 2024-2025, un montant de près de 1,9 million de dollars a déjà été octroyé pour soutenir les « services pour les auteurs de violence sexuelle et pour les hommes victimes d’agression sexuelle ».

Renouer avec soi

Le fait de demander de l’aide a changé la vie de plusieurs hommes victimes de violences sexuelles.

C’est ce qui est arrivé à Martin. L’homme de 49 ans revient de loin. Il raconte avoir eu de lourdes séquelles après avoir été agressé sexuellement durant son enfance par un cousin. « J’ai des black-out. Quand il m’abusait, c’était automatique, je sortais de mon corps. »

En décembre dernier, il a pris son courage à deux mains et a contacté le CRIPHASE. « Je regardais mon téléphone et je voulais le briser. Mais il fallait que je le fasse. Ma tête d’adulte ne voulait pas, mais la petite voix en dedans de moi, oui. » En l’espace de six mois de thérapie, il a fait des pas de géant. « J’ai arrêté de consommer de la drogue et de fumer la cigarette, dit-il. Je dois me donner ce que j’ai à me donner. »

Martin a récemment renoué avec sa passion de jeunesse, le chant. « Je suis en train de redécouvrir ça », lance-t-il, fier de lui, le regard brillant. En esquissant un sourire, l’homme ajoute avoir osé sauter en parachute, il y a quelques semaines. « Sur la vidéo de mon saut, on aperçoit mon visage. On dirait celui d’un enfant qui ouvre les yeux pour la première fois et qui voit quelque chose de beau. »

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