Alter ego de Didier Deschamps depuis leurs premiers pas à l’OM, en 2009, et homme de l’ombre de l’équipe de France, Guy Stéphan va disputer sa sixième grande compétition avec les Bleus, cet été, en Allemagne. Avec, dans son baluchon, une coupe du monde mais aussi les souvenirs de deux finales perdues, face au Portugal à l’Euro 2016 et à l’Argentine au Mondial 2022.
S’il ne parle jamais d’un sentiment de revanche ou d’une volonté de rachat après le grand échec de 2021, le Costarmoricain entend faire de cette expérience une source de motivation pour la compétition à venir. Laquelle ne sera belle, comme il l’a expliqué lors de notre entretien à Clairefontaine, que si le groupe vit à l’unisson et se sert de ses expériences passées pour avancer.
Après treize ans en équipe de France, six grandes compétitions, trois finales et une victoire, est-ce qu’on finit par avoir les clés du succès ? Ou du moins connaître les petites choses qui nous font dire qu’une aventure peut aller loin ?
L’expérience c’est à mon sens avant tout un vécu. C’est le fait d’avoir connu des choses extraordinaires et des événements un peu moins agréables comme lors de l’Euro 2021. Et quand on vit ce genre de moments, le sportif de haut niveau, qu’il soit joueur ou entraîneur, sait que derrière l’essentiel c’est de rebondir. Comment ? En analysant ce qu’on a fait de bien et de moins bien, voire de mal. Et de rebondir, donc, comme on l’a fait en 2021 en remportant la Ligue des nations trois mois après le 8e de finale de l’Euro, et plus tard en étant finaliste de la Coupe du monde. Après, en ayant participé à autant de grandes compétitions, ça sera notre huitième avec Didier (en comptant la Ligue des nations), on ne se sent pas plus fort mais on a des repères. Même s’il y a une remise en cause permanente. Et le fait que l’attente soit de plus en plus importante au fil des années nous oblige aussi à nous adapter par rapport à ça. Ce qui est très important c’est d’avoir toujours faim. Il faut avoir faim, qu’on soit jeune, moins jeune, expérimenté ou non. Le talent ne suffit pas. Pour gagner il faut avoir les deux, les compétences et l’envie d’y retourner pour gagner.
Vous dites souvent que le confort n’est pas générateur d’effort… C’est l’idée derrière cette notion de faim, aussi, non ?
Oui c’est ça. Je vais prendre l’exemple du 8e de finale contre la Suisse en 2021. Après avoir fait une première période très difficile, on avait réussi à sortir la tête de l’eau pour finalement mener 3-1. Et puis en dix minutes, parce qu’il y a une forme de déconcentration collective, parce qu’on fait moins de passes appuyées, qu’on met le ballon derrière, qu’on est moins concentré, parce que ceci, parce que cela, tout s’écroule. Car pendant ce temps-là, l’adversaire, lui, il joue. Et le haut niveau est impitoyable, il ne supporte pas le moindre moment de déconcentration, il ne supporte pas qu’on baisse sa garde. Mais avec le recul, je dirais que ça fait partie de l’expérience, c’est important de passer par ces phases-là pour apprendre. Je parlais de rebond tout à l’heure en Ligue des nations, mais on peut aussi parler de l’Euro 2016, qui est un Euro réussi, même si on échoue en finale. Cet été-là, il y a eu un gros pic, c’est la demi-finale contre l’Allemagne à Marseille, avec une ambiance fantastique, la victoire au bout, mais avec une finale qui arrivait très vite derrière. Finale qu’on avait mal négociée, il faut le dire, dans l’approche mentale de l’événement. Mais ce vécu-là nous a permis, j’en suis intimement persuadé, d’aller au bout en Russie deux ans plus tard.
Parce que l’encadrement, parce que les joueurs, Pogba, Kanté, Lloris, Giroud et d’autres, avaient vécu ça en 2016 et refusaient de le revivre deux ans plus tard. Je me souviens de cet état d’esprit après chaque victoire. L’Uruguay, l’Argentine, un moment très fort, la Belgique. On sentait après chaque match que les joueurs refusaient de plonger dans l’euphorie. C’était « c’est bien les gars, on a gagné, mais ce n’est pas fini, on n’a pas encore ce qu’on est venu chercher ». C’est en ça que je dis que l’expérience peut s’avérer payante.
C’est la fameuse phrase de Pogba sur les pâtes… (à la mi-temps de France-Argentine, il avait déclaré dans le vestiaire « Je ne veux pas rentrer, moi ce soir je ne rentre pas. On reste encore à l’hôtel, on va encore bouffer ces putains de pâtes sautées ! »)
Oui, voilà, c’est exactement ça. C’est important pour l’entraîneur d’avoir des joueurs avec cette mentalité-là. On n’a pas à rabâcher, « attention, il y a encore un match », les mecs en ont bien conscience et c’est un gros plus dans un groupe.
Ou placeriez-vous l’importance de la notion du groupe quand on bâtit une équipe pour une grande compétition internationale ?
Tout en haut ! Elle est fondamentale. Ce n’est pas simplement la liste des meilleurs joueurs du pays et du moment, il y a aussi la complémentarité des joueurs, l’équilibre, le talent, et puis la cohésion, l’état d’esprit. C’est important de bien connaître les joueurs, d’où le suivi qu’on fait avec Didier tout au long de l’année. Il faut qu’on sache exactement comment ils réagissent dans des situations de gagne mais aussi et surtout dans les moments où ça va moins bien. L’état d’esprit est fondamental pour aller loin dans une compétition. Entre ceux qui jouent et ceux qui ne jouent pas, ceux qui entreront en cours de match et ceux qui ne joueront pas du tout. Je ne sais pas si ça sera le cas cet été mais ça peut arriver. Or ces joueurs-là doivent aussi contribuer au bon état d’esprit de l’équipe.
C’est ce que vous écriviez dans vos carnets de 2022. Vous dites que les premiers mots de Deschamps au groupe c’était pour leur dire qu’il ne tolérera aucun état d’âme.
Oui. Il faut que tout le monde soit conscient de sa place, de son rôle dans le groupe et que tout le monde soit irréprochable dans son comportement au quotidien. C’est primordial parce que, vous avez beau avoir du talent, si à l’arrivée il y a un grain de sable qui vient enrayer la machine, c’est embêtant.
Quand est-ce qu’on sait qu’on a fait le bon choix du groupe. Au Qatar, vous parlez de la victoire face au Danemark, où tous les joueurs étaient debout sur la table, à chanter.
Oui je m’en souviens bien. Ils chantaient la fameuse chanson, là…
Gala, Freed from Desire.
Voilà ! Et là je me souviens de dire à mon épouse « il se passe quelque chose ». On sentait, alors qu’on était encore dans les matchs de poule, une véritable cohésion dans le groupe. Après, je ne peux pas dire que je nous voyais déjà aller jusqu’en finale, non, ça serait trop facile. Mais disons qu’on ressentait les prémices de quelque chose de beau. Ça c’est bien, mais il faut plus que ça, plus qu’une simple ambiance. Il faut être capable de retranscrire ça dans le jeu, être solide, créatif, marquer des buts, lutter ensemble, résister.
Aujourd’hui, comment sentez-vous ce groupe ?
Le groupe va bien, ça c’est la fameuse phrase bateau. Mais c’est un peu l’idée. Même si, pour le moment, il faut distinguer plusieurs petits groupes. Ceux qui ont beaucoup joué, je pense à Saliba, à Griezmann, ceux qui ont un peu moins joué ces dernières semaines voire ces derniers mois. Eux, c’est important de les remettre à niveau physiquement le plus rapidement possible. Et ensuite, il faut sans cesse se préoccuper de cet état d’esprit, il faut être attentif aux comportements des uns et des autres dans la vie de tous les jours. Ce que je remarque après trois jours (l’interview a été réalisée le vendredi 31 mai), je vois beaucoup de sourires couplés à une vraie envie de travailler. Ce n’est que le début mais je dirais qu’on est sur le bon chemin.
Parlons un peu du terrain maintenant. Ou plutôt du banc. Comment vivez-vous les matchs avec Didier dans les grandes compétitions ? Des études ont montré que le rythme cardiaque pouvait atteindre des sommets lors des matchs, vous confirmez ?
Ça fait quinze ans que ça dure, donc ça fait quand même quelques matchs, mine de rien. Je pense qu’on le vit… Pas sereinement mais assez sereinement, même s’il y a des pics d’adrénaline sur des matchs importants, que ce soit en 2016 contre l’Allemagne, en 2018 contre l’Argentine ou en 2022, toujours contre l’Argentine, où il faut arriver à se contrôler, à rassembler ses pensées, ne pas céder à la panique. C’est pour cela qu’on échange énormément avec Didier pendant les matchs. Il y a aussi des moments plus calmes où, lui comme moi, allons être plus silencieux car dans l’observation. Et puis il y a des moments clés, en seconde période, au moment de faire ou non des changements. Là on dialogue à nouveau beaucoup tous les deux mais c’est évidemment Didier qui prend la décision à l’arrivée. Le plus dur, parfois, c’est de parvenir à transmettre aux joueurs un message d’engagement mais sans tomber dans l’énervement, on se doit de véhiculer aussi une certaine sérénité. L’énervement est la pire chose qui puisse arriver depuis un banc. Ça, ça se traduit notamment avec le quatrième arbitre qui est à quatre ou cinq mètres de nous, c’est souvent vers lui qu’on se tourne quand on pense qu’une décision de l’arbitre n’était pas la bonne. Là aussi, il faut être capable de juger le moment où il faut l’ouvrir et le moment où il vaut mieux se taire. Mais bon, avec nous ça va, on n’est pas des fous. Ça peut arriver qu’il y ait un petit coup de sang, mais globalement on n’est pas des fadas.
On va vous replonger sur le banc, lors du France-Irlande en 8e de finale de l’Euro 2016. Vous allez prendre une décision qui va changer la suite de l’histoire, en positionnant Griezmann au cœur du jeu après une première période pas loin d’être horrible. Vous vous souvenez de ce moment ?
Oui. On s’est dit tout simplement qu’il y avait quelque chose qui ne fonctionnait pas en première période. Et on a pensé qu’Antoine, notre joueur créatif par excellence, serait probablement plus à l’aise et plus utile dans l’axe du terrain. On a donc sorti « NG » (Kanté) à la pause, même si ce n’était pas forcément lui le moins bon sur cette première mi-temps, mais il a fallu faire un choix, et comme il avait pris un carton jaune, on a jugé que c’était la meilleure solution. Coman est entré à droite et Griezmann a tout de suite été très bon et générateur de danger pour l’adversaire dans cette position. Voilà, parfois on fait des choix qui fonctionnent plutôt bien (rires). J’en parlais l’autre jour avec quelqu’un : les choix de Roger Lemerre lors de la finale de l’Euro 2000, qui fait entrer Wiltord, Pirès et Trezeguet. On est sur le banc, à quelques mètres les Italiens sont déjà quasiment en train de fêter le titre, et à l’arrivée ce sont ces trois joueurs qui font la différence, on égalise et derrière il s’ensuit ce qu’on sait. Le coaching peut aussi parfois rentrer dans l’histoire. Ce n’est pas toujours le cas, mais quand ça arrive de votre côté vous êtes contents.
Finale de 2022, là aussi c’est un autre sacré coup de coaching, avec les sorties de Dembélé et Giroud à la 41e minute, alors que l’Argentine mène 2-0 et que les Bleus ont la tête sous l’eau. Qu’est-ce que vous vous dites à ce moment-là avec Didier ?
On voyait là aussi que ça n’allait pas du tout. Il y avait des joueurs qui, sans être malades, avaient un petit virus qui traînait, ils étaient un peu moins bien la veille et le jour du match. On a donc décidé de faire ces deux changements très rapidement, avant même la mi-temps. Ce n’est pas une sanction, même si c’est évidemment très, très dur de se voir remplacer en finale de Coupe du monde au bout de 35-40 minutes de jeu, et ils ne l’ont pas bien vécu. Mais on pensait que c’était la meilleure chose à faire et, même si ça a mis un peu de temps avant d’aller mieux, dans le dernier tiers du match ça a très bien fonctionné et il n’a manqué qu’un petit chouïa pour que l’histoire soit fabuleuse.
A l’inverse, en 2021, face à la Suisse, vous faites des changements tardifs et le match bascule dans le money time. Est-ce qu’à ce moment-là, vous sentez que la rencontre vous échappe ?
On n’est jamais sûr et c’est toujours plus facile de la dire a posteriori, trois ans après « Oui, je le sentais ». Mais sur le coup, tu l’as dit ? Mais oui, malgré tout, on sentait un peu la chose venir… On avait quand même deux buts d’avance, on sentait justement cette euphorie, qui n’est pas génératrice d’efforts, poindre. Parfois ça peut passer, même quand on en fait un peu moins, là ce n’est clairement pas passé. Ce n’est pas pour rien qu’on dit que les cinq minutes après avoir marqué sont les plus importantes, et nous non seulement on avait un but d’avance mais on en avait deux. Mais voilà… C’est le foot de haut niveau et il est impitoyable.
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