Son époux a été tué dans l’attaque du fourgon pénitentiaire : le cri de colère de Mary

« C’est bizarre, je le sens pas, ce transfert. Je sais pas pourquoi, mais je le sens pas. » Il est 4 heures du matin, mardi 14 mai, lorsque Arnaud Garcia glisse cette phrase à sa femme, Mary. « Il est parti tôt ce matin-là pour sa mission, on s’est souhaité bonne journée, après notre “je t’aime” habituel, nous confie Mary. Arnaud connaissait le pedigree du détenu depuis une semaine, il m’a juste dit qu’il s’agissait d’un mis en examen pour complicité d’assassinat. Il était très attaché au secret professionnel, même avec moi – je ne savais pas la tentative d’évasion, ni le changement de niveau de sécurité –, mais ça n’était pas la première fois qu’il transportait ce genre de prévenu. »

Les mots et le regard pleins de force et de courage, Mary Garcia, 35 ans, aide-soignante en soins palliatifs, nous reçoit ce lundi de Pentecôte dans le charmant pavillon qu’elle et son mari ont fait construire à Blangy-le-Château (Calvados) il y a bientôt sept ans, en face d’une petite forêt de saules apaisante, penchée sur une colline, comme un hommage. Arnaud est un enfant du village. Son père, Dominique, commandait la gendarmerie. Arnaud a grandi dans les bâtiments, enfant curieux des enquêtes de son père et fasciné par l’arme qu’il n’avait pas le droit de toucher. Il aurait pu devenir gendarme, mais Dominique l’en a dissuadé.

Vacances à Villers-sur-Mer (Calvados), en septembre 2023.

Vacances à Villers-sur-Mer (Calvados), en septembre 2023. © DR

« Dans les campagnes, le métier a perdu le côté relationnel », estime cet homme si fier de son fils. Bac S, École nationale d’administration pénitentiaire, surveillant brigadier en 2009. « J’assure le service après-vente ! » plaisantait Arnaud auprès de ceux qui lui demandaient pourquoi il n’avait pas suivi le parcours de son père.

Passionné de mythologie grecque

Sur une étagère du salon, l’écusson bleu de la pénitentiaire, un paquet de cigarettes entamé, un Daruma (figurine à vœux japonaise). « Sur l’œil gauche, nous fait observer Mary, le vœu que nous avons fait d’avoir un enfant. L’œil droit, on devait le marquer à sa naissance… » Non loin, des livres sur le GIGN, sur les armes, d’autres ­qu’Arnaud venait de recevoir et qu’il s’apprêtait à lire : la mythologie grecque de A à Z, sa passion depuis ce voyage de noces en Crête.

Au-dessus du canapé, ces mots encadrés, « Today is a good day to be happy », petit tableau acheté pour leur mariage, le 18 juin 2022, célébré par son père, Dominique, 64 ans, devenu deuxième adjoint de Blangy, 850 habitants, chargé de la sécurité, des finances et des ressources humaines. Depuis deux jours, Mary a retrouvé un peu de sérénité, presque d’apaisement, car, dit-elle, la dépouille d’Arnaud est enfin à proximité de la maison, dans une chambre funéraire à 8 kilomètres de là. Il est resté si loin d’elle, près d’une semaine, à la morgue de Rouen.

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Le jour de leur mariage, le 18 juin 2022. Ils se sont rencontrés au collège.

Le jour de leur mariage, le 18 juin 2022. Ils se sont rencontrés au collège. Paris Match / © Baptiste Giroudon

« À 10 h 50, mardi dernier, poursuit-elle, Arnaud m’a envoyé un texto : “Tout se passe bien, on est sur la route du retour, je serai ­rentré vers 17 heures, je t’aime.” » Sept minutes après, le convoi arrive au péage d’Incarville. « J’étais à la maison avec une amie qui venait déjeuner. Vers midi, Samuel, un collègue de mon mari, m’appelle : “Regarde la télé, on parle d’un problème survenu à Val-de-Reuil.” J’ai vu défiler un bandeau, il évoquait deux morts et trois blessés, sans plus de détails et sans images. J’ai regardé Google Maps pour vérifier la route qu’Arnaud prenait pour cet aller-retour Évreux-Rouen. J’ai appelé une fois, deux fois sur son portable perso et sur son pro, qu’il m’avait donné. J’ai continué comme ça sans m’arrêter, peut-être trente, quarante fois. »

 Au téléphone, j’ai tout de suite reconnu la voix d’Éric Dupond-Moretti : “Vous êtes le papa d’Arnaud Garcia ?” 

Dominique, le père d’Andy

Son cœur bat très fort, Mary se dit qu’il y a une chance sur cinq pour que… Elle contacte le Prej (pôle de rattachement des extractions judiciaires) de Caen. Ils n’ont aucune info ou ne veulent pas lui en donner. Elle téléphone alors à son beau-père. « J’ai appelé la direction à Rouen, nous raconte Dominique. Ils m’ont dit qu’ils me rappelaient dans dix minutes et, dix minutes après, j’ai tout de suite reconnu la voix d’Éric Dupond-Moretti : “Vous êtes le papa d’Arnaud Garcia ?” »

Mary, Dominique et sa femme, Annick, se sont interdit de regarder les images glaçantes de cette mort en direct. Le soir, Mary est allée dormir chez ses parents. Dominique a filé en pleine nuit au péage : « J’ai voulu voir la situation du terrain, m’imprégner des lieux », dit cet ancien enquêteur. En rentrant, il a trouvé sa femme qui déambulait dans tout le village à la recherche de son fils : « Annick ne voulait pas y croire. »

Avec Dominique, le père d’Arnaud, le 20 mai.

Avec Dominique, le père d’Arnaud, le 20 mai. Paris Match / © Baptiste Giroudon

Lui, jusqu’au petit matin, a regardé des photos d’Arnaud, puis il est allé à la mairie hisser le drapeau français… à mi-hauteur du mât. Les deux jours suivants, il n’a pu ni dormir ni rien avaler, à l’exception d’une mandarine. Vendredi 17 mai, à 9 h 30, Dominique passe chez sa belle-fille et l’emmène à la chambre funéraire avec les vêtements qu’elle a choisis : « Un sweat, un jean et ses Converse. Il n’aimait pas les costumes ! » sourit Mary avec tendresse. Elle a décidé du cercueil. « Choisir un cercueil à 35 ans, c’est pas dans la nature des choses », murmure son beau-père en retenant des larmes.

 Après l’attaque du premier véhicule, Arnaud a ouvert sa portière, main sur son arme, mais il n’a pas eu le temps de tirer 

Mary

En fin d’après-midi, avant ­d’aller voir le corps de son mari, Mary s’entretient avec un de ses collègues, le conducteur du second véhicule où tous deux se trouvaient. Elle sait déjà qu’Arnaud a été atteint par une balle, une seule, en pleine tête. Son beau-père le lui a dit, il a contacté des amis policiers. « Ça m’a fait beaucoup de bien de parler avec le conducteur, toujours en état de choc. Il m’a raconté qu’au moment d’arriver au péage, ils décidaient de l’endroit où ils iraient déjeuner avec les autres, devant. Bref, ils ont parlé cuisine, une des passions d’Arnaud. Aussitôt après l’attaque du premier véhicule, Arnaud a ouvert sa portière, main sur son arme [un PM 9 mm, NDLR], mais il n’a pas eu le temps de tirer. J’appréhendais de voir son visage, mais j’ai été rassurée. »

Le capitaine Fabrice Moello, 52 ans, travaillait dans la pénitentiaire depuis vingt-huit ans.

Le capitaine Fabrice Moello, 52 ans, travaillait dans la pénitentiaire depuis vingt-huit ans. © DR

Mary garde pour elle son ressenti envers les assaillants. « Je veux juste dire ma colère. C’est un assassinat. » Elle préfère les souvenirs heureux, d’abord lorsqu’ils se sont retrouvés, onze ans après leur rencontre au collège Gustave-Flaubert de Pont-l’Évêque.

 Il était fier de travailler pour la justice – il détestait l’injustice –, mais il en avait un peu marre du train-train 

Mary

« En quatrième et en troisième, on était dans la même classe d’espagnol. Chacun a suivi sa route et, en 2013, j’ai vu passer un message qu’Arnaud postait sur Facebook. Une blague de mecs, assez salace, que je n’ose répéter ! J’ai répondu : “Ah ! C’est du propre !” et on s’est revus. On a parlé un après-midi entier, je lui ai dit que je me rappelais son K-Way bleu et son cartable, on a constaté qu’on avait démarré nos carrières au même âge, à 19 ans, et on a fini par s’embrasser, ça s’est fait très naturellement. Il est resté quinze ans surveillant de détention. Il était fier de travailler pour la justice – il détestait l’injustice –, mais il en avait un peu marre du train-train “on ferme les portes, on donne la cantine” et, en 2016, il a postulé pour la Prej. Il a commencé le 1er mars dernier. J’avais des réserves sur ce nouveau métier, c’est tout de même plus risqué, mais je respectais son choix. Je l’ai vu retrouver le goût d’aller travailler. Il voyageait, comme ces deux jours passés à Coutances (Manche) où, aux assises, il a surveillé un détenu jugé pour tentative d’assassinat, encore un. Depuis le box des accusés, il était fier d’assister aux débats. Et puis tout ça tombait bien, j’étais enceinte, il avait ses nuits et ses week-ends libres. »

Arnaud et Mary avaient annoncé au village la venue de ce bébé, longtemps désiré, le 8 mai, pendant le vin d’honneur à la mairie. « On voulait être sûrs ! » explique Mary. « Ils avaient une de ces bananes ! » se souvient Dorian Coge, 35 ans, l’édile de Blangy-le-Château, qui a usé les mêmes bancs d’école qu’Arnaud.

Ce passionné de course à pied laisse une femme et deux garçons.

Ce passionné de course à pied laisse une femme et deux garçons. © DR

Dehors, l’avocat de la famille attend. Me Thibault de Montbrial, qui a défendu la mémoire d’Arnaud Beltrame, est en week-end dans la région. Il a été contacté par le père d’Arnaud. « Un cap alarmant a été franchi, analyse-t-il. Hormis le terrorisme, tuer froidement, pour rien, un fonctionnaire de police, c’est un tournant majeur. L’exécution faisait partie du plan d’évasion. C’est une évidence lorsqu’on regarde les images. »

 Un humour très noir, décalé, qu’il ne fallait surtout pas prendre au premier degré 

Mary

On retrouve Mary après leur entretien. Une dizaine d’amis débarquent. Depuis une semaine, on se relaie jour et nuit auprès d’elle. Les amis de la pénitentiaire et ceux du travail de Mary se connaissaient déjà. Ici, c’était chaque week-end des barbecues, voisins et famille compris, Arnaud à la manœuvre, côtes de bœuf et sauces inventées par lui, soirées à refaire le monde, ponctuées de ses blagues, « un humour très noir, décalé, qu’il ne fallait surtout pas prendre au premier degré ! » précise Mary. Lucie, Nicolas, Estelle, Maxime confirment. Ils évoquent les passions de leur ami : le RC Lens, qui, samedi au stade Bollaert, a observé une minute de silence, la moto (sa Moto Guzzi 1 200 cm3), les jeux vidéo, le flipper et ses tatouages – deux drapeaux normands, un Daruma au mollet et le buste d’une déesse grecque, offert il y a trois semaines par Mary. Elle garde pour elle le prénom de leur enfant, qu’ils avaient choisi ensemble. Elle ne connaît pas encore son sexe. Elle l’apprendra à l’échographie, le 30 mai, sans le papa.

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Par Joseph GARCIA

Responsable édition

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