San Francisco. Il fait gris, on se croirait à Calais. Très loin de l’image qu’on a de la Californie, des sans-abris partout, des drogués déambulant sur les trottoirs interminables. San Francisco, c’est sinistre quand on arrive avec la chanson de Maxime Le Forestier en tête. C’est mon premier grand voyage seul avec les enfants, et j’ai la pression de le réussir. Nous voilà sur les docks où j’ai réservé un hôtel, et les enfants tombent de fatigue.
– Il est 13 heures, on va pas dormir quand même ? On va aller voir le pont de San Francisco ?
Je me dis qu’ils vont en prendre plein la vue, que ce sera le vrai début de ces vacances. Nous partons à pied, et le vent qui souffle dans nos dos nous oblige à tenir debout, mais finit par nous décourager : on monte dans un taxi parce que c’est encore trop loin. On aperçoit enfin un bout du pont rouge qui émerge dans le brouillard épais. Ça a l’air très beau, même si on ne voit rien.
– On va rester longtemps ? râle Louise.
– Ben, on va marcher sur le pont, c’est fou d’être ici, hein ?
– C’est bon, on le voit, là, renchérit Hugo.
– Je n’ai pas fait onze heures de vol pour entendre ça !
Épuisés, mes deux ados s’énervent encore plus vite. Hugo marche 10 mètres devant moi et Louise 10 mètres derrière, tout en scrutant l’écran de leur téléphone plutôt que d’admirer le décor.
– Regardez, bordel !
J’essaie de nous rassembler tous les trois pour un portrait de famille monoparentale et heureuse, mais ils ont froid…
Faut dire que c’est moche par ce temps. Et bruyant, avec le va-et-vient des voitures. On parvient quand même à deviner la côte et la vue imprenable. Elle est même tellement imprenable qu’en photo, ça ne rend pas, on dirait les argentiques « non facturées » d’autrefois. J’essaie de nous rassembler tous les trois pour un portrait de famille monoparentale et heureuse, mais ils ont froid, et Louise veut acheter un magnet du pont pour le frigo.
Il n’y a pas dans leurs yeux les étoiles que j’imaginais avant de partir. Alors n’étant pas encore au bout de ma peine, je me dis qu’on a le temps d’aller voir la célèbre rue sinueuse de la ville, Lombard Street. Je ne lâcherai rien tant qu’ils ne seront pas frénétiquement enthousiastes. Mais faudrait peut-être que je le sois déjà, moi.
– Il est où le magasin Nike ? tente Hugo.
Je fais peut-être trop le papa-touriste-parfait, je me sens nul tout seul, sans une femme quidirait : « Allez, on leur fout la paix, ils vont chez Nike et nous, on ira boire un apéro. » Sauf que leur mère, lorsque nous voyagions ensemble, était plus midinette qu’eux et cherchait tous les spots vus dans le magazine Elle. J’ai souvent été seul dans cette famille. Il fallait que tout soit comme elle voulait, et souvent, je trouvais ça bien, de me laisser porter, je veux dire. Un jour, j’étais en train de repasser et je l’ai entendue me dire : « C’est sympa, mais faut pas trop que je te voie le faire… » J’ai perdu ma virilité sur-le-champ. Ça voulait dire : « Pour le repassage, tu repasseras, petite chose ! » Je croyais que ça pouvait être sexy. Une fois sans doute. Mais pas tout le temps. Je m’aperçois que le modèle années 1950 macho-soumis résiste. C’est terrible à constater. C’est comme la javel qui désinfecte mieux que les produits bio. Tous mes couples d’amis en quête de parité ont splitté. Seuls durent le poing qui tape sur la table et le silence qui règne en cuisine.
Nous n’avons jamais trouvé la Lombard Street, enfin si, le bas de la rue, et nous avons eu la flemme de remonter ses virages infinis.
Là, je suis sûr que je vais cartonner avec ces fucking boulettes.
Retour à l’hôtel avant d’aller dîner. J’ai l’adresse du restaurant mythique de Francis Ford Coppola, le Cafe Zoetrope, au pied du bâtiment Art déco surnommé le Sentinel Building. C’est une cuisine italienne, donc idéale pour les enfants. Je leur dis que les spaghettis aux boulettes sont la spécialité de l’endroit. Là, je suis sûr que je vais cartonner avec ces fucking boulettes. On passe le grand rideau rouge, on se croirait dans un bistrot parisien. Les enfants gobent leur plat et je me détends un peu après cette journée marathon.
– Papa, on peut aller se chercher un bubble tea ? lance Louise.
Décidément, c’est la soirée boulettes. Je les regarde partir, ils ont maintenant 12 et 16 ans. Ils se font un peu peur à marcher seuls dans cette ville pour aller chercher en face leurs bulles magiques que je trouve dégueu, mais ils ont l’air grisés d’être libres, et leurs propres pas les devancent. Moi, je reprends un verre de vin rouge, seul à table, et j’aime bien. Ce soir, je dormirai encore avec eux, dans la même chambre, j’essaierai de glaner des câlins comme on le fait si souvent depuis la séparation, en regardant un film tous les trois dans mon lit. Je leur apporte une pomme coupée, un yaourt avec des pralines dessus, ou une glace. Mais c’est déjà hier. Ils grandissent, et je n’ai rien vu venir.
L’amour n’est plus qu’un mot que j’utilise dans mes chansons. J’en mets partout, c’est très pratique. À force de placer l’amour au rang de mythologie grecque, je l’imagine plus grand qu’il ne doit être, dans la vraie vie. Je l’ai mis en jachère, ça m’évite de culpabiliser de tout ce temps perdu à ne plus aimer. J’ai l’impression qu’il a besoin de ça, l’amour : qu’on le laisse revenir vers nous quand lui le voudra. Je piste les enfants depuis la vitrine du restaurant, ils vont vers leur bubble tea comme vers un monde que je ne connais pas. Ils appartiennent désormais à celui-là, plus au mien, plus à moi. Un père, ça s’abandonne vite.
On me propose un 4×4 décapotable pour le même prix. Oh putain, je vais cartonner, là. Je dis oui aussitôt.
Nous quittons San Francisco. Je loue une voiture pour redescendre la côte jusqu’à Los Angeles. Huit cents kilomètres de paysages merveilleux, sur la R1, cette route culte qui borde le Pacifique et surplombe les falaises impassibles. On me propose un 4×4 décapotable pour le même prix. Oh putain, je vais cartonner, là. Je dis oui aussitôt. Nous arrivons dans le parking et, après avoir traversé les interminables allées de voitures fraîchement lustrées, nous trouvons notre bolide.
– Waw ! font-ils en chœur.
– Mais c’est tout en plastique, ce 4×4, c’est pas du tout écolo ! dézingue ensuite Louise.
– Et parce que ton bubble tea, c’est mieux ?
Silence. Et là, je me sens comme un papa cowboy, un papa viril et entreprenant. Comment ça s’enlève cette capote ? Je n’arrive pas à la retirer. Les enfants, déjà installés dans le cabriolet, se battent pour savoir qui chargera son téléphone en premier.
– Taisez-vous, c’est moi qui vais charger le mien, car j’en ai besoin pour le GPS !
C’est comme une voiture de Playmobil, ça ne fait presque pas sérieux ce 4×4. Ce n’est pas nouveau chez moi, je ne suis pas un expert en automobiles américaines, je n’arrive jamais à les démarrer. Où est cette foutue clé ? Je n’ai entre les mains qu’une cellule ovale qui ne rentre nulle part. Je cherche même sous le volant. J’essaie de la passer plusieurs fois devant le tableau de bord comme un code-barres dans les supermarchés. Mais le bip ne viendra jamais.
Le GPS est une voix féminine, qui remplace la femme qui n’est pas là.
Finalement, il n’y avait pas de clé, il fallait juste poser la cellule qui ouvre et referme les portes, puis appuyer avec le frein en même temps que sur le bouton start. Je démarre en marche arrière, car je crois toujours que le R, c’est pour rouler ou road. Je finis par avancer, et le GPS annonce que nous serons à Santa Cruz dans moins de deux heures. Le GPS est une voix féminine, qui remplace la femme qui n’est pas là. Elle me parle, me dit que je suis dans la bonne direction, que je suis bientôt arrivé à destination, c’est une présence qui compte. On est quatre dans cette voiture.
Louise avait 6 ans quand leur mère m’a quitté. Un jour, elle est venue chercher les enfants avec ses écouteurs géants sur les oreilles, deux couettes, une planche de skate sous le bras (la sienne, je précise) et un tee-shirt Fuck Yoga.
– Mais qu’est-ce qui t’arrive ?
– Ben tout va très bien. Pourquoi ?
– Tu changes tellement…
– Je suis libre !
Libre, mais de quoi ? Libre comme un post Instagram qui attend des likes ? Je me souviens des enfants avec leurs valises à roulettes qui la suivaient. Elle ne pensait même pas à les aider tellement elle voulait incarner la femme libre et indépendante, après quinze années passées avec moi. Louise traînait sa valise qui dérapait dans le caniveau sans que sa mère ne se retourne, celle-ci sachant sans doute que je les regardais partir – c’est une image tellement triste qu’elle me hante encore aujourd’hui. Je n’ai pas vu de liberté. Juste un comportement libertaire. Et j’ai pleuré.
Une énorme fête foraine longe la plage. On se gare pour aller se balader dans ce paradis désuet.
Musique à fond dans la voiture, l’arrivée à Santa Cruz sous le soleil même timide fait du bien après deux jours de brouillard à San Francisco, qui a tout rendu bof. Une énorme fête foraine longe la plage. On se gare pour aller se balader dans ce paradis désuet. Tous les stands de bouffe sont une incitation à la violence. C’est cher, gras et mauvais. Les frites sont des quarts de patates imbibées d’huile, les saucisses sont grosses et orange comme dans les dessins animés, les glaces n’existent pas sans qu’elles soient mélangées à des cookies écrasés, des bonbons ou des coulis de caramel qu’on croirait plastifiés au moment où ils sortent d’une bombe-pistolet très efficace.
– Papa, pipi…, chouine Louise.
– Va aux toilettes, il doit y en avoir partout ici, c’est l’Amérique !
Je commande trois hotdogs, pour nous caler avec le moins de risques d’intoxication alimentaire possible.
– Hugo, où est ta sœur ?
– Bah euh, ché po moua…, participe Hugo, débordé de hotdog.
– Ça fait quinze minutes, là !
Panique. Elle n’a pas son téléphone. J’imagine en quelques secondes le drame.
Panique. Elle n’a pas son téléphone. J’imagine en quelques secondes le drame. Disparition, kidnapping, que sais-je. « Je tremble comme un philosophe », disait Voltaire – j’ai toujours aimé cette phrase. Nous partons en direction des toilettes, qui s’avèrent très loin du stand où nous étions. Je rentre dans les toilettes pour femmes voir si Louise y est, mais je me fais refuser l’entrée par une dame-pipi mexicaine (on doit appeler ça autrement là-bas).
– My daughter ! She is lost !
Elle s’en fout puisqu’elle a ordre de ne laisser aucun homme entrer dans les toilettes pour femmes, et me sort un papier de déclaration de perte à remplir. Non mais j’ai que ça à foutre ?
– Hugo, rentre chez les femmes, et regarde si ta sœur y est ! hurlé-je.
Elle répète « non » comme un robot.
– Can you go and check for me ? She is called Louise.
Elle ne veut pas bouger de son poste, car elle n’en a pas le droit. Quelle soumission débile ! Que faire ? Je hurle : « Louise ! »
– Keep calm, sir, me conseille mon ennemie jurée.
Je pars chercher un micro pour lancer une recherche. Je cours parmi des gens qui rient et s’empiffrent en marchant. Je rêverais d’être à leur place, et leur indifférence à mon angoisse me les rend encore plus écervelés. Est-elle revenue au stand ? S’est-elle perdue en revenant ? Je vais crever sur place dans une fête foraine à Santa Cruz.
– Papa, elle est là ! me libère aussitôt Hugo.
Décidément, cette génération qui claque des Pop it et boit des bubble tea, ça va être mignon quand ce sera vieux.
Je l’engueule de m’avoir fait ce coup-là. Je l’engueule, car ça n’a pas duré longtemps. Si je l’avais cherchée pendant une heure, le soulagement serait tel que la prendre dans mes bras aurait été l’unique option. Si je l’engueule, c’est parce que ce n’est pas grave, au fond. Elle a traîné au stand des Pop it, ces jeux antistress, pendant que moi, je me faisais un mouron de fou. Encore un truc à bulles. Décidément, cette génération qui claque des Pop it et boit des bubble tea, ça va être mignon quand ce sera vieux.
Nous n’avons jamais trouvé l’entrée pour acheter les tickets de la grande attraction, les montagnes russes. Impossible d’acheter un ticket sur place, il fallait le faire en ligne ou je ne sais quoi, rien n’est simple, on se casse. De toute façon, ce soir, on dort à Carmel, au Cypress Inn, l’hôtel très dog friendly de la célèbre actrice Doris Day, qui adorait les chiens. Les enfants vont aimer, ils adorent les labradors. Dans cet hôtel, c’est un monde merveilleux pour tous les genres de toutous. Il y a des espèces de grands caniches au regard patient. Ils sont coiffés, teints en rose ou en bleu, et portent même des lunettes pour le fun. Leurs maîtres éprouvent pour eux un amour fou. Toute la déco rappelle cet amour canin. Des nonos de toutes les couleurs du bonheur, des portraits de chiens peints comme des Joconde pas peu fières, des cabines de soins pour nos amis à quatre pattes, et tout le tsoin-tsoin. Louise est arrivée pour notre voyage avec des cheveux bleus, comme un hommage prémonitoire à ce lieu.
– Ça va rester ou c’est un truc qui part au lavage ? dis-je pour relancer le débat.
– Ça va rester ! me rassure Louise.
– Tu vas aller comme ça à l’école ? rajouté-je peu rassuré.
– Oui.
– Mais non !
– C’est ma vie. Tu n’as pas le droit de critiquer ma couleur de cheveux ni mon outfit.
– Tu as 12 ans.
– Et alors ? Mon corps m’appartient. Personne ne peut décider qui je suis.
– Mais t’es encore une enfant, arrête avec ton discours TikTok ! Il faut agir pour être engagé, juger ne suffit pas.
Toutes les filles de son lycée aux cheveux bleus sont des féministes moches.
Hugo, mon fils déjà ado, ajoute, pensant parler pour moi et chauffer la salle, que toutes les filles de son lycée aux cheveux bleus sont des féministes moches.
– Hugo ! Tais-toi ! réagit Louise.
– Je les vois, elles ne se font jamais draguer et leur couleur de cheveux va avec leur discours. Elles repèrent les filles populaires qui se font draguer par les mecs, et elles leur disent qu’elles sont en fait « harcelées ». Mais c’est parce qu’elles sont jalouses.
– Hugo, tu vas trop loin, personne ne peut parler comme ça aujourd’hui et à ton âge ! Mais t’es trop réac à 16 ans ! tenté-je.
– Et elles restent entre elles, elles n’aiment pas les mecs. Elles sont lesbiennes.
– Stop, Hugo ! T’aimerais qu’elles te draguent peut-être ?
Louise me rappelle que c’est cool d’être lesbienne aussi.
– Je pense que je suis bi, crâne-t-elle.
– Qu’est-ce qui te fait dire ça à 12 ans ?
– J’adore prendre Jeanne dans mes bras et lui faire des câlins.
– Mais y a une différence avec le désir. L’amitié peut permettre des élans de tendresse, mais ça ne veut pas forcément dire que tu es bi.
– Où est le problème d’être bi ? nargue Louise.
Maintenant, il faut se labelliser ou se coller un tampon constamment !
– Mais aucun ! Mais pourquoi te coller une étiquette avant de l’expérimenter ? Ma génération s’est battue pour qu’il n’y en ait plus, et voilà que maintenant, il faut se labelliser ou se coller un tampon constamment !
– C’est non-stop avec elle, laisse tomber, papa… Moi je plains les générations futures qui auront beaucoup de mal à faire leur coming out pour annoncer à leurs parents qu’ils sont hétéros.
Je ris à cette sortie de mon fils.
– Vous êtes sexistes ! balance Louise.
– Arrêtez de critiquer les hommes, c’est quand même nous qui avons construit les villes, les monuments, c’est nous qui partons nous battre à la guerre. T’as vu le nombre de barbus qui sont morts en 14-18 ?
– Les poilus, Hugo, les poilus…, m’épuisé-je.
Alors que Louise pense que son frère et moi sommes antitout, Hugo croit bon d’en remettre une couche :
– Pour mon bac français, comme par hasard, on étudie la déclaration de la femme et de la citoyenne et aussi Rimbaud, on parle évidemment de son histoire avec Verveine.
– Verlaine, Hugo ! Verlaine !
– Oui, c’est pareil, t’as compris.
– Non, c’est pas pareil ! Tout n’est pas OK ! Le respect, ce n’est pas que l’écriture inclusive, c’est aussi respecter le nom des gens. Et puis déjà que vous ne savez pas accorder un participe passé, on va rigoler avec l’écriture inclusive.
J’ai décidément l’impression de trimballer Camélia Jordana et Michel Sardou à l’arrière de mon 4×4 tandis que nous traçons le long des côtes écorchées vives et sauvages, donnant la sensation que le seul endroit apprivoisé serait justement l’intérieur de cette voiture…
« Nous sommes une boutique non genrée »
Hugo fait de la boxe et du foot, il reste « posé » avec ses copains, loin de ces questions de notre époque, comme s’il était plutôt un enfant de ma génération. J’avais déjà remarqué ça chez lui quand, dans une boutique de fripes où il voulait s’acheter un vieux Levis, le vendeur lui avait suggéré un pantalon rose pâle à pinces, trouvant ça plus cool avec des sneakers, très « L. A. ». J’avais suggéré prudemment que ça faisait peut-être un peu « fille », ajoutant quarante-six pincettes supplémentaires à ce pantalon. « Nous sommes une boutique non genrée », m’avait froidement répondu le vendeur. Je n’ai pas su quoi répliquer, j’ai dit « on va réfléchir », j’ai fait le faux-cul. J’étais blessé de me sentir catalogué. C’est comme jouer à Docteur Maboul, dès qu’on frôle un sujet woke, ça buzze, ce n’est jamais la bonne phrase. Un mode de vie, ça devrait suffire pour montrer qu’on est ouvert et concerné. Les belles paroles, les premières pierres jetées, c’est un peu facile. Je travaille avec des artistes qui ont fait exploser les cadres et les schémas.
– Arrêtez de me voir comme un vieux lustre à pampilles qui fait du rock’n’roll ! insisté-je.
– C’est quoi des pampilles ? s’intéresse mollement Hugo.
– Regardez Michel, eh bien, dans les années 1970, il était déjà non genré à son époque, regardez ses looks sur Internet.
– Papa, arrête avec tes chansons d’un autre temps…
– Mais elles paient tes shampoings pour cheveux bleus !
– Quand est-ce qu’on va le voir, Michel ?
Michel, c’est Polnareff. J’ai écrit quatre textes avec lui pour son dernier album Enfin, ce qui m’a valu de rester avec le monstre sacré dans le désert de Palm Springs pendant presque quatre-vingts jours, en plusieurs étapes, là où je n’étais censé venir que cinq jours. J’ai promis aux enfants de leur présenter cet artiste devenu un ami et qui sera chez lui, avec son fils Louka. Mais ce sera pour la fin du voyage, quand nous aurons redescendu toute la R1.
« Interdiction de se baigner en cas de diarrhée les dix jours précédents et les dix jours suivants. »
Après une journée à Big Sur pour découvrir la beauté des forêts et parcs nationaux, nous faisons un stop à San Luis Obispo pour coller un chewing-gum sur les murs d’une ruelle où sont immortalisés des milliers et des milliers de chewing-gums mâchés, ce qui prend la forme d’une œuvre d’art contemporain désespérément collective, puis nous reprenons la route jusqu’à Los Angeles. L’hôtel, enfin, mais surtout la piscine. Et du soleil ! Tout est parfait dans cet environnement soigné de l’hôtel Hollywood Roosevelt, si ce n’est la dizaine de pictogrammes qui gâchent la décoration exigeante. Je m’arrête sur le picto d’un bonhomme dont le postérieur expulse des gouttes de manière exponentielle. Je m’approche pour lire la légende : « Interdiction de se baigner en cas de diarrhée les dix jours précédents et les dix jours suivants. »
– Louise ? Personnellement, je ne trouve pas normal que cette minorité de gens qui ont la diarrhée en vacances ne soit pas défendue. Qu’en penses-tu ?
Ma mini-woke sourit et plonge en me trouvant toujours aussi nul. Je joue le second degré quand ils n’en ont pas, parce qu’au fond ils me touchent à rêver d’un monde parfait qui ne le sera jamais. On fait tous les trucs trop touristiques, les étoiles sur Hollywood Boulevard, les studios Universal et Warner Bros. On ne fait rien d’original, mais c’est bon de rêver ensemble sur ces clichés que nous avons en commun, véhiculés par les films.
Comment leur laisser un peu d’insouciance pour qu’ils restent des gamins, eux qui semblent déjà tellement mécaniquement concernés.
Le soir, je les regarde dormir, j’ai le sentiment que c’est le seul moment où leur esprit peut se reposer. Toute la charge d’informations, d’angoisses au sujet du futur écologique, de politique mondiale, cette dystopie qui pointe et ne disparaît jamais de leur vision quotidienne… Comment leur laisser un peu d’insouciance pour qu’ils restent des gamins, eux qui semblent déjà tellement mécaniquement concernés.
Quand nous arriverons chez Michel à Palm Springs, par 50 °C, et que les enfants, à peine entrés, iront se jeter dans sa piscine, je garderai cette réplique de Louise en mémoire, lorsque je lui demanderai plus tard : « Ça t’a fait quoi de rencontrer Polnareff ? »
– Il était trop mignon lorsqu’il nous a apporté des esquimaux à la piscine, on aurait dit un petit garçon.
Allons enfants !
L’écrit initial est réédité de la manière la plus honnête que possible. Pour toute observation sur ce sujet concernant le sujet « men chastity », veuillez utiliser les coordonnées indiquées sur notre site web. sexymendirectory.net vous a préparé ce post qui débat du sujet « men chastity ». sexymendirectory.net est une plateforme numérique qui globalise diverses infos publiées sur le web dont le sujet de prédilection est « men chastity ». Il y a de prévu plusieurs articles sur le sujet « men chastity » dans quelques jours, nous vous invitons à consulter notre site web aussi souvent que possible.